10 avril 2009

Les minutes noires

Martín SolaresEditions Christain Bourgeois

Ramon Cabrera, dit Le Grizzli, est inspecteur de police et enquête sur l’assassinat d’un jeune journaliste. Petit à petit, sa hiérarchie lui glisse d’abord des peaux de bananes sous les pieds, puis des bâtons dans les roues. C’est qu’au fur et à mesure que son enquête progresse, Cabrera fait ressurgir un passé dont certaines élites de la ville de Paracuan dans l’état de Tamaulipas, ont tout à redouter. Le Grizzli se retrouve sur les traces de Vincente Angel, un de ces prédécesseurs, qui avait mené la traque d’un tueur de petites filles qui avait fait 4 victimes plusieurs années auparavant. Et quand il apprend que le présumé coupable, incarcéré pour 30 ans, est innocent, il comprend que les choses vont être particulièrement délicates à gérer.
Le début de la lecture requiert pas mal d'attention lors de la mise en place des nombreux personnages et l’utilisation en plus pour chacun d’eux de surnoms. C'est sans doute pourquoi l’auteur a jugé bon d’inclure en tête de livre la liste de ses protagonistes. Parmi eux on aura d’ailleurs la surprise de trouver B. Traven et Alejandro Jodorowsky à travers une BD. Le livre de Martín Solares n’est pas un de ceux qui assoient leur trame sur les serials-killers et leur mode opératoire, qui la ne sont qu'accessoires. A travers les évènements remis au jour par son inspecteur, il dénonce de façon implacable la corruption de la police, de la justice, des autorités élues de la ville et de l’état et jusqu’à la Présidence de la République, des politiques, des syndicalistes, des journalistes et des industriels, tous complices pour établir une loi parallèle uniquement dédiée à leurs profits, asphyxiant l’état de droit et les citoyens qui ne savent plus vers qui se tourner. Pris dans ce désespoir sans fin et sans fond, il arrive alors qu’ils se résignent à accepter la « protection » offerte par les narcotrafiquants. Mais quand la violence est le seul mode d’expression, quand la police secrète aux ordres du Président lui-même décide du résultat des enquêtes, quand des innocents sont en prison pendant que les coupables sont protégés, quand un adolescent armé impose sa lecture, très personnelle, du code de la route parce qu'il est le fils du capo du cartel local, que reste t-il comme perspectives d’avenir ? L’histoire semble lui donner raison puisque le Président visé par Solares, dont l’orthographe du nom est à peune modifié, vient de passer au travers de la justice pour les évènements de 1968 à Mexico.
Martín Solares dit : « Ce qui m'intéresse n'est pas de créer des miroirs de la réalité mais d'en proposer des mirages : des récits qui puissent convaincre le lecteur de suivre une série d'images plus suggestives que celles du quotidien, afin de le submerger dans une autre réalité - la fiction littéraire - et transformer ainsi son point de vue. Mon intention était d'inventer une maison blanche qui ait une maison noire à l'intérieur, au centre de laquelle il y aurait un jardin.»
A la lecture de ce roman noir, il faut souhaiter que beaucoup d’engrais puisse être apporté à ce jardin. Il en faudra une quantité certaine si on veut que quelques fleurs éclosent sur un tel terreau. Ce qui résume le mieux le livre, c'est l'image du nagual, créature des légendes préhispaniques, omniprésente dans l'ouvrage. C'est un être mi homme mi bête, mâle ou femelle qui hante chacun de nous, et qui selon la nature de l'animal voire du végétal, renforce la part sombre ou éclairée de notre personnalité et qui, dans ce contexte, peut symboliser la force de la corruption, à laquelle on doit résister mais à laquelle il est parfois confortable de céder.
Ph.H.

6 avril 2009

El jardin de la señora Murakami

Mario Bellatin
Tusquets editores

Mario Bellatin es un autor de novelas extrañas, raras, de novelas negras. Es el eterno buscador de formas nuevas en la escritura latinoamericana contemporánea, como nos demuestra su gusto de escribir de manera elíptica.Esta obra, está escrita con un humor particular, cruel y frío, con un estilo propio (inspirado de la literatura japonesa por su brevedad ) y original (veáse el adenda al relato), y nos hace reir. En esta novela corta nos describe con minucia y precisión la vida de Izu, desde su juventud hasta la muerte de su marido. Izu, hija dedicada al cuidado de sus padres. Estudiante de arte, quien sueña con tener de más en más de enmancipacion en una sociedad muy tradicional. La historia principal está centrada en Izu quien escribe un ensayo que provoca consternación y escándalo en el círculo cerrado de la ciudad donde vive y la manipulación y venganza que se prepara contra ella a causa de este ensayo.

Le jardin de la dame Murakami
trad. par André Gabastoud
Passage du Nord Ouest, 2005

Mario Bellatin écrit des romans étranges voire bizarres et d’autres noirs, Il est l’éternel chercheur de nouvelles formes dans l’écriture latino-américaine contemporaine, comme il nous le démontra dans son goût pour l’utilisation de l’ellipse dans la forme.Dans cette oeuvre courte, il écrit avec un humour particulier, cruel et froid, un style propre (inspiré de la littérature nippone dans le sens du goût pour la brièveté) et original, il nous fait rire (lisez l’annexe du récit).Il décrit avec minutie et précision la vie de Izu, depuis sa jeunesse jusqu’à la mort de son mari. Izu, fille dédiée à ses parents, étudiante en art, rêvant de plus d’émancipation dans une société très traditionnelle. L’histoire est centrée sur Izu qui écrit un essai provocant émoi et scandale dans le cercle fermé de la ville où elle habite, et la manipulation et la vengeance qu’elle subi.
Bellatin n'est pas le premier à s'être interessé par la forme esthétique nippone, Jorge Luis Borges a écrit dix-sept haïkus dans le recueil "La Cifra". Le méxicain José Juan Tablada avait utilisé aussi ce style des poèmes japonais en 1919 dans son oeuvre "poèmes synthétiques"
Autres livres du même auteur (traduits en français) :
Jeu de Dames (Damas Chinas), traduit de l'espagnol (Mexique) par Svletana Doubin, Gallimard, 2008.
Flore (Flores), traduit par Chrystelle Frutozo, Passages du Nord-Ouest.
Leçons pour un lièvre mort, (Lecciones para una liebre muerta) trad. par André Gabastou, préf. de Emilie Colombani, éd. Passage du Nord Ouest, 2008.
Jacob le mutant, suivi de Chiens héros, (Jacobo, el mutante, Perros héroes), Traduit par André Gabastou et Gabriel Iaculli, phot. de Ximena Berecochea et Mario Bellatin, éd. Passage du Nord Ouest, 2006.
Shiki Nagaoka : un nez de fiction, (Shiki Nagaoka: Una nariz de ficción) trad. par André Gabastou, phot. de Ximena Berecochea, éd. Passage du Nord Ouest, 2004.
Salon de beauté, (Salón de belleza) trad. par André Gabastou, éd. Stock, 2000.
ROB

Uno soñaba que era rey

Enrique Serna
Booket novela
Quand je serais roi, éditions métaillié, 2009

Enrique Serna es uno de los autores contemporáneos mexicanos más importantes. Ha escrito varias novelas entre las que se encuentran: “Fruta Verde”; “Señorita México”; “El miedo a los animales”; “El seductor de la patria” y varios cuentos entre ellos “El orgasmógrafo”; “Amores de segunda mano”.Algunas de sus obras han sido traducidas al francés y publicadas en Francia, es el caso de “La Peur des bêtes”( phébus, rayon noir, traduction de François GAUDRY) y “Amours d’occasion” (atéliers du Gué, traduction Marie-Ange BRILLAUD).Uno que soñaba que era Rey es una de sus primeras novelas en la cual (tal y como lo hacen Balzac y García Márquez) podemos encontrar a algunos de su personajes recurrentes como el comisario Maytorena (que utiliza en El miedo de los animales) o el chico que trabaja en una agencia de publicidad (que retoma en Fruta Verde). Esta novela se lee ávidamente puesto que Enrique Serna logra cautivarnos desde las primeras páginas con el retrato que nos hace de la sociedad mexicana, de sus valores o ausencia de ellos, de sus pobrezas y riquezas, de sus amores y desilusiones, de sus aciertos y torpezas. A través sus principales personajes podemos observar a esta sociedad y darnos cuenta de las enormes diferencias existentes entre ellos, empezando por los diversos medios sociales en los se desenvuelven: el crítico intelectual revolucionario que está obligado a alabar al sistema a cambio de un salario mediocre; el empresario preocupado por la educación de su hijo, preocupación olvidada en los momentos en que se encuentra con su amante; los niños chemos; los niños héroes, las mujeres que observan determinadas conductas religiosas y la corrupción de la policía. Escritor mordaz, crítico y picaresco, ¡les invito a leerlo!
ROB

Un doux parfum de mort

Guillermo Arriaga
Un dulce olor a muerte
Traduit de l’espagnol (Mexique) par François Gaudry
Editions Points (première édition chez Phébus), 2008

Un bled perdu au Mexique, un cadavre de jeune fille, un assassin trop malin pour se faire pincer et un innocent à qui on fait endosser le crime, voilà pour le décor. Les villageois réclament « le prix du sang », mais les flics sont trop pourris pour agir. Bien malgré lui, un brave garçon va être poussé à jouer les vengeurs... Un conte d'amour et de mort, un vaudeville sanglant arrosé de tequila. 

Arriaga, c’est le scénariste des films Babel, 21 grammes, Amores perros, Trois enterrements … Un doux parfum de mort est un roman picaresque et tragique dont l’histoire se déroule dans un petit village perdu dans le Mexique rural. Tragique car tout commence par la découverte du cadavre d’une jeune fille. Comme à son habitude, l’auteur met alors en place les protagonistes et les paramètres qui conduiront au dénouement. Picaresque car il dresse des portraits de femmes et d’hommes avec une encre acide et ironique en exagérant certains traits que l’on prête aux mexicains, jusqu’à friser la caricature, manière pour lui de dénoncer les excès de cette société. Ces personnages aux caractères hauts en couleur conduiront ce vaudeville, entre amour et mort, à un dénouement aussi brutal que son début. Entre deux noirceurs, celle de l’humour et celle de l’histoire, c’est la première qui l’emporte. On sourit donc franchement en lisant les improbables aventures amoureuses de Ramon et Adela.

PhH.


Un dulce olor a muerte.
Norma grupo editorial, México.

 
Arriaga es el escritor de los escenarios de las películas Babel, 21 gramos, Amores Perros, Los Tres Entierrros de Melquiades Estrada…..Un dulce olor a muerte es una novela picaresca y trágica cuya historia se desarrolla en un pueblo pérdido en el México rural. Trágica puesto que todo comienza por el descubrimiento del cádaver de una jovencita. Como siempre, el autor posiciona a los protagonistes y a los parámetros que le conduciran hasta el fin. Picaresca puesto que hace los retratos hablados de los hombres y mujeres con ácidez e ironía exagerando algunos rasgos que se atribuyen a los mexicanos, hasta llegar a ser caricaturales, es su manera de denunciar los excesos de esta sociedad. Esos personajes con caracteres variados son el hilo conductor de esta historia burlesca, entre amor y muerte, hasta el final tan brutal como el principio de la novela. Entre dos mundos negros, el del humor y el de la historia, es el primero que gana. Sonreímos de manera franca leyendo las improbables aventuras amorosas de Ramón y Adela.

Ph H

Giros negros

Enrique Serna
Ediciones Cal y arena, 2008, México

Según el autor el término Giros negros fue creado para “designar los puestos de fayuca, les garitos clandestinos, los expendios de drogas y los antros de putas con bebidas adulteradas.” Escogió este término para crear una rúbrica publicada en la revista mexicana de literatura Letras Libres, después continuó escribiendo sobre el tema en otras revistas como Nexos, Confabulario y Crítica. Este libro es una compilación de esas crónicas cuyo objetivo es describir el espíritu de una época en México. Crónicas organizadas en ocho partes. Todas relacionadas a la descripción de una forma de pensar de actuar del mexicano. Algunos ejemplos con respecto al idioma y los sueños y a las canciones rancheras y a los boleros:
 

“Cada lengua configura la realidad y divide el tiempo de manera distinta. En inglés, por ejemplo, no hay tiempos imperfectos y para expresar la idea de permanencia en el pasado es preciso recurrir a perifrasis como used to. En los idiomas donde el tiempo no se puede abolir, la experiencia del sueño se difumina al abrir los ojos. Nosotros en cambio, hablamos y pensamos en una lengua que fue creada ex profeso para conjugar el tiempo suspendido del inconsciente. Por algo dijo Carlos V que el español es la mejor lengua para hablar con Dios. Más que un accidente gramátical, el uso del pretérito imperfecto en la narración de los sueños parece un mensaje cifrado con que el genio del idioma quiere revelarnos algo, pues confirma la creencia, compartida por todas las religiones, de que el tiempo onírico es el único tiempo real.”
 

“Por temor al sufrimiento, los hombres y las mujeres ligth prefieren evitar los altibajos de la pasión…sin tomar en cuenta que al privarse de ese riesgo se privan también de una existencia más plena… Existe un tercer camino para exprimir la sustancia de la vida sin resecarla: disfutar al máximo las alegrias y saborear golosamente las penas, como los grandes compositores de boleros y canciones rancheras”. “Casi todas las canciones celebran una ruptura desgarradora o la traición de una ingrata. Como festejar los descalabros del corazón denota, cuando menos, una mentalidad tortuosa y derrotista….Sin duda, hay algo impúdico y grotesco en cantar a lágrima viva:

Maldito corazón
me alegro que ahora sufras
que llores y te humilles
ante este gran amor.

Pero sin haber alcanzado esa tesitura emotiva, ¿quién puede asegurar que de verdad está vivo?” Finalmente, no hay que olvidar que Enrique Serna nos confiesa que ha escrito este libro con el ánimo festivo y chocarrero del espectador que asiste a una carpa.

Vean cantado a Pedro Infante "Fallaste corazón" y otras canciones.


 
Des cours des miracles
Cal y arena, 2008, México (pas encore traduit)

Selon l’auteur le terme Giros negros a été crée pour désigner "les points de vente des marchandises de contrebande, les commerces clandestins, les endroits pour vendre de la drogue et les maisons closes où on vend des alcools frelatés". Il a choisi ce terme pour créer et entretenir une rubrique publiée dans le magazine de littérature mexicain Letras Libres, il a continué d’écrire après sur le sujet dans d’autres revues telles que Nexos, Confabulario et Crítica. Ce livre est une compilation de ces chroniques dont l’objectif est de décrire l’esprit d’une époque au Mexique. Elles sont organisées en huit parties, chacune étant la description d’une manière de penser et d’agir des mexicains, avec quelques exemples par rapport à la langue et aux rêves, et par rapport aux chansons rancheras ou boléros.
 

"Chaque langue configure la réalité et divise le temps de manière distincte. En anglais, par exemple, il n’a pas de conjugaison à l’imparfait et pour exprimer l’idée de permanence dans le passé, il est nécessaire d’utiliser des périphrases comme used to. Dans les langues ou le temps ne peut être ignoré, l’expérience du rêve se diffuse au réveil. Nous, par contre, nous parlons et nous pensons dans une langue qui a été créée ex profeso pour conjuguer le temps suspendu de l’inconscient. Ce n’est pas pour rien que Charles V a dit que l’espagnol est la meilleure langue pour converser avec Dieu. Plutôt qu’un accident grammatical, l’utilisation du prétérit imparfait dans le récit des rêves apparaît comme un message chiffré avec lequel le génie de la langue veut nous révéler quelque chose, car il confirme la croyance, partagée par toutes les religions, de que le temps onirique est le seul temps réel ".
 

"Par crainte de la souffrance, les hommes et les femmes ligth préfèrent éviter les vicissitudes de la passion…sans prendre en compte le fait que au moment de se priver de ce risque ils sont en train de se priver aussi d’avoir une existence plus remplie… Il existe un troisième chemin pour presser la substance de la vie sans la dessécher : profiter au maximum des joies et savourer avec gourmandise les peines, comme cela a été fait par les grands compositeurs de boléros et des chansons rancheras. Presque toutes ces chansons célèbrent une rupture déchirante ou la traîtrise d’une ingrate. Comme le fait de fêter les blessures du cœur montre, du moins, une mentalité tortueuse et en déroute ….Sans aucun doute, il y a quelque chose d’impudique et grotesque dans le fait de chanter et pleurer à chaudes larmes :

Mon cœur maudit
je suis ravi de que tu souffres,
que tu pleures et que tu t’humilies
devant ce grand amour.

Mais sans avoir jamais réussi à atteindre ce nirvana émotif, qui peut prétendre dire qu’il est vraiment en vie ?"Finalement, il ne faut pas oublier que Enrique SERNA avoue qu’il a écrit ce livre avec l’état d’esprit joyeux et plaisantin du spectateur présent au cirque.

ROB.