Gabriel Trujillo Muñoz
éditions Folio, 2012
Mexicali, état de Basse-Californie du nord, est une ville frontière. Cette frontière entre le Mexique et les Etats-unis rappelle le mur de Berlin, le rideau de fer, le mur autour de la Palestine ou les murailles de Jéricho. Même si à ce jour, aucune armée de trompettistes ne l’a détruit ni même lézardé. Pourtant il est poreux ce mur, y passe les produits de divers trafics, d’êtres humains, de drogue, d’armes ou d’argent sale. De part et d’autres de cette limite bétonnée règnent les narcotrafiquants, faisant de ce coin du continent américain une zone particulièrement dangereuse. C’est dans cet endroit peu attirant qu’est né Gabriel Trujillo Muñoz. Peu attirant mais paradoxalement, il draine malgré tout toute la main d’œuvre servile du lumpenprolétariat qui espère un travail dans les maquiladoras ou, rêve chimérique, passer au nord pour accéder au mode de vie exemplaire de l’oncle Sam.
éditions Folio, 2012
Mexicali, état de Basse-Californie du nord, est une ville frontière. Cette frontière entre le Mexique et les Etats-unis rappelle le mur de Berlin, le rideau de fer, le mur autour de la Palestine ou les murailles de Jéricho. Même si à ce jour, aucune armée de trompettistes ne l’a détruit ni même lézardé. Pourtant il est poreux ce mur, y passe les produits de divers trafics, d’êtres humains, de drogue, d’armes ou d’argent sale. De part et d’autres de cette limite bétonnée règnent les narcotrafiquants, faisant de ce coin du continent américain une zone particulièrement dangereuse. C’est dans cet endroit peu attirant qu’est né Gabriel Trujillo Muñoz. Peu attirant mais paradoxalement, il draine malgré tout toute la main d’œuvre servile du lumpenprolétariat qui espère un travail dans les maquiladoras ou, rêve chimérique, passer au nord pour accéder au mode de vie exemplaire de l’oncle Sam.
Le livre débute sur les chapeaux (de cow-boys) de roues (de 4X4). Trois cadavres sont jetés au fond d’un arroyo. Presque en même temps, Heriberto est retrouvé mort dans une chambre d’hôtel. Anastasio, vieil ami d’Heriberto et de Morgado demande alors à celui-ci de se pencher sur les circonstances de la mort qui apparaissent bien troubles. De fait, les activités d’Heriberto étaient parfois tournées vers le jeu, et il avait contracté une dette plus que rondelette auprès d’une tenancière d’un cercle clandestin. Les amis de cette ennemie n’étaient pas des amis pour Heriberto.
L’enquête de notre avocat des droits de l’homme, ce qui n’est pas une sinécure au Mexique, va et vient entre une veuve éplorée découvrant les turpitudes de son mari, une fille lubrique mariée à un voyou, la police qui considère que c’est une affaire de drogue puisque un sachet a été retrouvé sur le cadavre. Morgado peut compter sur Anastasio, ancien militant anarchiste qui philosophe sur les temps modernes et la victoire, et donc sa défaite, de l’individualisme, de l’argent facile, et le narcotrafic qui pourrit tout.
Trujillo Muñoz pimente son récit d’allusions érotiques, de gueules de bois douloureuses sous le climat torride de Mexicali. L’auteur joue d’ailleurs sur cette chaleur accablante qui pousse parfois à la nonchalance et qui contraste avec la dureté des faits et la rapidité de leur survenance. Les intervenants sont nombreux, un gang de motards faisant dans le social lui sert d’anges gardiens. Dans les coups durs, Anastasio parvient à reformer sa brigade comme à l’époque de Ricardo Flores Magon. La police mexicaine est fidèle à sa réputation, inefficace et corrompue. Pour compliquer le tout, DEA et CIA étasuniennes viennent mettre leurs grains de sel – et de sable – dans cet imbroglio. Car si le nombre de pages est supérieur à celui des autres livres de la série, les faits et personnages sont eux aussi plus denses. Il faut suivre avec attention et l’enchainement des évènements est parfois trop rapide et pas claire.
Mezquite Road est un cliché social, politique et sociologique de cette partie du monde, lieu de rencontre de tous les prédateurs, nombreux et variés, qui tournent autour des fortunes nées du narcotrafic, et planent tels les zopilotes au dessus de leurs victimes, femmes, pauvres, indiens, enfants, ce qui génèrent souvent des situations sordides.
Mais, Morgado va parvenir, non pas à faire triompher le bien, la tâche est bien trop démesurée, mais à résoudre l’affaire d’Heriberto et redorer un peu son blason. Joueur, peut-être, malhonnête certainement pas. C’était un innocent, au sens propre et figuré, victime collatérale de la violence endémique de ces provinces du nord du Mexique comme l’ont déjà été plusieurs dizaines de milliers de personnes. On notera avec plaisir le rôle important d’Alicia, la femme plantureuse et hardie dont Morgado est amoureux. Son personnage est attachant, mais Morgado doit-il lui faire une confiance aveugle ?
Ph.H.