14 février 2016

Churubusco


Andrea Ferraris
Editions Rackham, 02 - 2016
200 pages en noir et blanc et en couleur - 20,00 €

An 1847. Résolus à s’emparer de la Californie, les États-Unis déclarent la guerre au Mexique et en envahissent le territoire. Dans les rangs de l’armée occupante, un bataillon entier – le Saint-Patrick – prend la décision de déserter. Les hommes du Saint-Patrick – tous des immigrés irlandais, espagnols et polonais – ne supportent plus les discriminations, les violences et les exactions de leurs officiers yankees. Désormais, dans cette guerre meurtrière et injuste, ils vont se battre aux côtés des mexicains. Ils sont devenus les San Patricios.

Dans la colonne yankee qui sans relâche poursuit les déserteurs, chevauche Rizzo, un jeune sicilien. Arrivé au Nouveau Monde dans un bateau chargé d’hommes et de femmes fuyant la faim et la misère, Rizzo s’est enrôlé en échange d’une promesse d’obtenir la citoyenneté et un lopin de terre. Devant le village de Churubusco, dernier rempart des rebelles, lui aussi va devoir choisir de quel côté se ranger. Churubusco est un roman graphique surgit des plis – réels et imaginaires – de l’Histoire pour raconter la fin héroïque de l’impossible rêve de liberté des San Patricios. Le récit d’Andrea Ferraris – pétri de poussière et de sang – nous rappelle à chaque page que se dresser contre les abus et l’oppression est juste et nécessaire. Quel qu’en soit le prix à payer.

© Ferraris - éditions Rackam

Une exposition-vente des planches originales et des dessins préparatoires de Churubusco aura lieu dans le Marais, à la Librairie italienne Tour de Babel (10, rue du Roi de Sicile – Paris 4e – M° Saint-Paul) du 9 mars au 9 avril 2016. Vernissage de l’exposition et dédicace d’Andrea Ferraris le mardi 8 mars à partir de 19 heures. Nous vous conseillons d’y faire un tour, les pages originales de Ferraris sont vraiment impressionnante. (éditions Rackham)

PhH

6 février 2016

Si nous vivions dans un endroit normal

Juan Pablo Villalobos
Traduit de l'espagnol (Mexique) par Claude Bleton
Editions Actes Sud, octobre 2014
Collection Lettres latinos américaines

Le jeune Oreste vit au sommet d’une colline dans une bourgade mexicaine peuplée de vaches, de prêtres et d’ingénus qui croient aux fantômes, aux ovnis et aux miracles. Sa nombreuse fratrie, affublée de prénoms grecs par un père professeur d’éducation civique, se dispute tous les soirs les sempiternelles quesadillas* préparées par une mère mélodramatique, acharnée à convaincre sa progéniture que la piteuse famille appartient à la classe moyenne.
Alors qu’une fraude électorale** sème la zizanie dans le village, la disparition dans un supermarché des “jumeaux pour de faux” Castor et Pollux fournit à Oreste le prétexte rêvé pour entreprendre l’odyssée de sa vie et découvrir le vaste monde qui s’étend au pied de sa butte.
Louvoyant habilement entre peste et choléra (nationalisme populiste et catholicisme pathologique), l’auteur fige son pays dans une désopilante caricature pour stigmatiser les errements d’une société livrée au non-sens : corruption, violence, pauvreté, trafics en tout genre.
André Breton tenait le Mexique pour un pays surréaliste, on observe que ce serait là un moindre mal.

Source Éditions Actes Sud

*  Les quesadilla font partie des antojito (en-cas) mexicains, mais aussi d'Amérique centrale. Elles sont réalisées à partir de tortillas de mais ou de blé,  garnies de fromage fondant (queso oaxaca par exemple). On peut y ajouter de nombreux éléments, champignons, viande, fleurs de courgettes, cactus ... Les quesadillas sont cuites sur une plaque d'acier appelée comal.

** La fraude électorale est une donnée incontournable de la démocratie mexicaine. Elle sévit à tous les niveaux, élection des maires, des députés, des gouverneurs et des Présidents de la République. Il est plus que probable que les élections présidentielles de 1994 qui ont vu la défaite de Cuauthémoc Cardenas contre Carlos Salinas de Gortari ont été entachées d'une fraude massive (panne électrique) qui a inversé le résultat. En 2006, le candidat vaincu (de 0,56%) Lopez Obrador n'a pas reconnu sa défaite face à Calderón, et en 2012, Lopez Obrador a mis en cause le parti du vainqueur (Peña Nieto -PRI) pour achat de votes et en pointant la surexposition de ce dernier dans les médias, grâce au canal de télévision Televisa.