Traduit de l'espagnol (Mexique) par Annette et Jean-Claude Andro
(première édition : 1970)
éditions Gallimard, 09-1994
Présentation de l'éditeur
Dans le Chiapas, au sud du Mexique, vivent, d'un côté, les Indiens tzotziles de San Juan Chamula , de l'autre les ladinos, Blancs de Ciudad Real, dont le riche propriétaire terrien Cifuentes, qui opprime les Indiens, usant même d'un «droit de viol» sur les jeunes Tzotziles. C'est dans ce contexte d'irréductible opposition entre les deux communautés qu'arrive un jour l'ingénieur Ulloa, animé d'idées progressistes, qui rêve de faire l'éducation politique des Indiens. Mais la «bonne nouvelle» de justice sociale qu'il apporte, dans son idéalisme ignorant de la singularité indienne, est immédiatement détournée par la communauté tzotzile, qui lui donne une ampleur mythique, en l'interprétant comme l'annonce du retour de ses propres dieux. Sous la conduite de Catalina, superbe figure d'ilol, de prophétesse inspirée, les Indiens mettent à mort le curé Manuel et crucifient un enfant indien qui sera, à l'égal du Christ pour les ladinos, leur Grand Sacrifié à eux. Puis, sous la conduite d'Ulloa, ils se soulèvent contre leurs oppresseurs.
Inspirée par les rapports entre les Blancs et les Indiens du Chiapas à l'époque de la réforme agraire de la fin des années cinquante, jamais cette double tragédie – religieuse et sociale –, qui est en même temps un grand roman, n'a semblé plus cruellement d'actualité qu'aujourd'hui.
L'auteur
Rosario Castellanos (1925 -1974) est une romancière, poétesse et essayiste mexicaine.Elle passa son enfance à Comitán, dans le Chiapas. Elle y fut directement témoin des conditions de vie et de travail des Indiens Mayas. Ses parents, des propriétaires terriens, durent s'installer à Mexico lors des réformes de Lázaro Cárdenas lorsque Rosario Castellanos avait seize ans. Après une maîtrise de philosophie à l'université nationale autonome du Mexique, elle partit étudier l'esthétique à l'université centrale de Madrid
grâce à une bourse de l'Institut de culture hispanique. Elle soutient
en 1950 une thèse sur la culture féminine. Elle bénéficia aussi d'un bourse Rockefeller au Centre mexicain des écrivains, de 1954 à 1955. Elle commença par travailler au poste d'animatrice culturelle à l'Institut des sciences et des arts de Tuxtla Gutiérrez, puis elle devint directrice du Théâtre Guignol au Centre coordinateur Tzeltal-Tzotzil, à l'Institut national indigéniste de San Cristóbal de las Casas. Elle
travailla ensuite comme directrice générale d'Information et de Presse
de l'université nationale autonome du Mexique (1960-1966). Elle reçut le Prix Chiapas en 1958 pour Balún Canán, roman
autobiographique narrant l'enfance d'une petite fille. Le Prix Xavier
Villaurrutia lui fut attribué pour Ciudad real en 1961.
Elle enseigna de 1962 à 1971 à la Faculté de Philosophie et de Lettres
de la même université. En 1962, son roman Oficio de tinieblas reçut le
Prix Sor Juana Inés de la Cruz. En tant qu'intellectuelle, elle permit aux femmes de s'affirmer dans la
société mexicaine. Ses derniers livres témoignent de son intérêt pour le
féminisme. Son intérêt pour les indigènes et sa dénonciation de leur
statut inégalitaire a pris une nouvelle résonance avec l'Armée zapatiste
de libération nationale (EZLN) en 1994.
Oficio de tinieblas
En 1867, en San Cristóbal de Las Casas, un grupo de indios chamulas se levantó en armas. Este hecho culminó con la crucifixión de uno de ellos, al que los amotinados proclamaron como el Cristo indígena. Rosario Castellanos penetra en esta novela las circunstancias y la psicología de los personajes que intervinieron en esos acontecimientos. Estas páginas atrapan el tiempo indígena en su naturaleza cíclica y ceremonial; pero más aún, se convierten en el reflejo universal de aquellos seres humanos determinados por una cultura milenaria cuyo choque con Occidente los ha herido y transformado. La joven que leía a Simone Weil en Chiapas comprendió, con ella, que el poder que une y destruye no es unívoco: proviene lo mismo del opresor que del oprimido.
(Letras Mexicanas - Fondo de Cultura Economico)
Oficio de tinieblas
L'Office des Ténèbres est le nom donné dans le rite romain, avant la réforme de Pie XII en 1955, aux matines et aux laudes des trois derniers jours de la Semaine sainte (jeudi, vendredi, samedi), qui selon la coutume de cette période, étaient anticipées le soir précédent. L'office devait « commencer de manière à finir après le coucher du soleil», d'où le nom de « Ténèbres ».
A propos de l’œuvre
Histoire, mythe et fiction dans Oficio de tinieblas de Rosario Castellanos
Un article de Virginie Ruiz
Résumé : Dans la dernière pièce de la « trilogie du Chiapas », Oficio de tinieblas (1962), Rosario Castellanos juxtapose trois époques : le soulèvement des Indiens chamulas au XIXe siècle, la Présidence de Lázaro Cárdenas, héritier de la Révolution mexicaine (1934-1940) et le présent de l’écriture. Par un travail de recréation de l’Histoire dans la fiction, l’auteure contrecarre le discours hégémonique et monologique des vainqueurs en nous plongeant dans la dimension magico-religieuse du mouvement messianique indien. Cependant, Rosario Castellanos véhicule l’idéologie de la politique indigéniste des années soixante selon laquelle les croyances mythiques sont un frein à la libération des Indiens, condamnés à rester en marge de l’Histoire.
Virginie Ruiz, «Histoire, mythe et fiction dans Oficio de tinieblas de Rosario Castellanos», Babel [En línea], 19 | 2009, Puesto en línea el 18 julio 2013, consultado el 19 mayo 2021. URL: http://journals.openedition.org/babel/245
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